LES CASSE-GOULOTS LAVOUSIENS
Le 16 octobre 1927, des Lavousiens se rassemblent pour créer une société de bigophones portant le nom de « Casse-Goulots Lavouxiens » qui a pour but :
« 1° - de faire des membres bigophoneux.
2° - de donner des concerts, etc.… »
Le siège social de l’association (déclaration au Journal Officiel du 10 novembre 1927) est fixé à la Salle des Fêtes des Lavoux, Hôtel Roy, l’actuel Bergerie.
« Le Ménestrel » du dimanche 19 juin 1887, journal s’intéressant à la musique et au théâtre et qui paraît tous les dimanches nous donne quelques explications sur ces instruments :
« Depuis trois ou quatre ans vous n’avez pas été sans remarquer des instruments de musique en carton, aux formes étranges, aux proportions énormes : ce sont les bigophones. Leur nom leur vient d’un simple vendeur de « trompes et de bouquins » sur les champs de foire, M. Bigot, qui eut un jour l’idée de régénérer les musiques de cirque, qui l’horripilaient. En moins de vingt-quatre heures il révolutionna toutes les fanfares, toutes les musiques instrumentales. Pour « jouer » d’un bigophone » quelconque, il n’est pas nécessaire de connaître ses notes. Il suffit de savoir un air et de le chanter dans un instrument en carton. Il va sans dire que les voix de basse chanteront dans des instruments décorés des noms de basson, baryton, bombardon, goliath, monstre, etc., et que les autres souffleront dans des chalumeaux, des flageolets, des musettes, des clarinettes, des trompes, des ophicléides, des serpents, des cornets, des pistophones, etc. Que tous ces noms n’effrayent pas les amateurs. Les « bigophones » ne diffèrent les uns des autres que par leurs formes baroques, excentriques ; mais il n’existe pas deux manières d’en jouer : il suffit de chanter dans l’embouchure. »
Faute de photographie, certains villageois se souviennent encore de leurs activités. Habillés de larges blouses sombres, ils animaient des bals à Lavoux et ailleurs. Il se dit aussi que, participant à un concours de bigophoneux, ils auraient été les premiers et reçu en cette occasion un diplôme...
C’est à l’aide d’un « Kazoo » (1), aussi appelé « mirliton » (2) qu’ils bricolaient leur instrument ou tout autre objet susceptible d’émettre des sons.
Nous pouvons supposer que le groupe de bigophoneux de Lavoux ressemblait à ceci :
Fanfare burlesque de la commune libre des quatre coins : les bigophoneux, 1927. (Collection : Musées de Chauvigny))
Nous avons retrouvé la liste des membres du bureau et les administrateurs qui composaient leur association à la création :
Il semblerait que « TIT Louis » représenté sur la carte postale ci-dessous était le président des « casse-goulots », ceci demande confirmation. (Les homonymes ne sont pas rares)
Les conditions d’admission sont drastiques et tout non-respect amène l’exclusion, à savoir :
. Ceux qui n’auront pas acquitté le montant de leur cotisation dans un délai de deux mois,
- Ceux qui viendraient à être l’objet d’une condamnation infamante,
- Les cotisations fixées à 5 francs doivent être réglées le 2ème dimanche de janvier,
- Des amendes sont infligées en cas de retard de paiement et en cas de manquement aux répétitions.
- L’amende est fixée à 2 francs pour la première et à 4 francs pour chacune des autres. »
Ces amendes et les cotisations étaient les seules ressources des « Casse-Goulots ».
Une chanson leur est dédiée. Nous n’en connaissons pas l’auteur. Elle fut retrouvée dans le cahier d’un appelé au service militaire et écrite pendant la période du service (3).
« Hommage aux « Casse-goulots »
1er couplet :
Mesdam’s à présent
Et vous brave gens
Vous trouverez de l’agrément l’on organise
Une société
De gens rigolos
Qui s’nomme des bigots
Pendant tout l’hiver Vous donnerons des concerts
Et même au printemps s’ils ont moment
Ils tâcheront de vous amuser.
Refrain
2ème couplet :
Ils sont croyez bien
Pas politiciens
Mais de gaie boute en train
C’est incroyable
Ce sont des diables
Ayant un idéal
Un but amical avec le sourire
Vous distraire, vous faire rire
Pour cela, soyez bien certains
Ils employeront tous les moyens.
Refrain
3ème couplet
L’on se met à rire
Quand on regarde
Comme s’est bien distribué :
Le fils Nicaisse
A la grosse caisse
Celui de la mère Annette
Joue de la clarinette
P. est timéléon
Qui joue du baryton
Pendant que le trombone à coulisse
Qui revient de l’amie d’Alice.
Refrain
4ème couplet
Pour vous distraire
Pour bien vous plaire
Comme nous sommes pas riches
Nous mettons en vente cette chansonnette
Pour remplir notre benasse
Soyez aimables
Messieurs, Mesdames
Et qu’on vous le proclame
Pour nous faire de la bonne réclame
Achetez nous en masse.
Refrain
Ces cacas, ces cacas, ces casse-goulots
Sont rigos, rigogo, rigolots
Ils ont des instruments particuliers
Qui vous entraînent et qui vous faut sauter
Ces cacas, ces cacas, ces casse-goulots
Sont rigo, rigogo, rigolots
Ce qu’ils nous jouent tous ces bons tourlourous
C’est rigolots, c’est tout.
Fait à 350 jours de la classe »
Cette chanson, dans son troisième couplet nous cite le nom de quelques instruments dont ils se servaient : Une grosse caisse, une clarinette, un trombone à coulisse. Cette énumération complète un souvenir qui nous a été donné : «Un membre de cet orchestre, surnommé « Tanas », était « violoneux. »
Ce groupe musical s’est éteint, sans que l’on sache quand ? Ne doutons pas que ce témoignage que nous vous proposons réactive chez quelques lavousiennes et lavousiens quelques souvenirs. Nous serions heureux de les recueillir… alors n’hésitez pas. Merci.
Autre temps, autre musique.
Lavoux a, à nouveau un groupe musical le "New Line Horizon" composé de Cédric (chanteur et guitariste) de Liniers, Vincent (le batteur) de Bonnes, Nicolas (basse de Lavoux).
- Kazoo : Il est constitué d’un tube fermé par une membrane. En chantonnant dans le tube, le musicien fait vibrer la membrane qui transforme le timbre de la voix en sons nasillards aux accents enfantins »
- Mirliton : petit instrument de musique populaire et bon marché, en roseau, puis en carton, bouché par un morceau de pelure d’oignon, baudruche, papier de soie.
- Ce cahier est la propriété de M. et Mme Martin Roland. Il a été écrit par Martin Savin, père de Roland. Martin Savin fut maire de Lavoux de 1955 à 1959.
Une fête est un excès permis, voire ordonné
Sigmund Freud
Réalisation : Chantal Popilus avec la participation de Robert Granseigne.