LA MARIANNE LAVOUSIENNE

Publié le par Les Amis du Patrimoine Lavousien

Marianne lavousienne de 1883 dans  le bureau de la mairie (Janvier 2015)

Marianne lavousienne de 1883 dans le bureau de la mairie (Janvier 2015)

Allégorie, triomphe de la République et de la liberté, la Marianne lavousienne se dresse dans le bureau d'accueil de la mairie. A gauche, en entrant le buste de Marianne est posé sur un pallier de l'escalier qui mène à l'étage, aujourd'hui salles d'archives et hier, logement de l'instituteur.

Lorsque l'on s'interroge sur le pourquoi de la féminité de la représentation de la République, la réponse apportée par Maurice Agulhon, historien est, « que Marianne est féminine parce qu'elle signifie : République ou France en République, parce que ces mots sont féminins et parce que dans la culture européenne reçue de l'antique, les valeurs abstraites prennent le genre de leur nom ». (1)

L'origine du prénom Marianne, contraction des prénoms Marie et Anne, très répandus au XVIIIème siècle, fut semble-t-il inspiré par une chanson révolutionnaire « La guérison de Marianne » écrite en octobre 1792, une dizaine de jours après la fondation de la République. « La chanson racontant les avatars du nouveau régime,l'utilisation de ce prénom comme symbole républicain serait donc née d'un consensus entre les partisans et les adversaires de la République, puis rapidement accepté par tout le peuple français ». (2)

Permettez-nous une petite parenthèse, liée à l'actualité.

La Marianne peut-être sculptée « en pied » ou « en buste » ; ainsi notre Marianne lavousienne en « buste » est l'équivalent de la statue située au centre de la place de la République à Paris, ainsi que de celle jugée sur le char de son triomphe, place de la Nation à Paris également.

Ces deux statues, figures de la République ont déterminé le parcours (de République à Nation) de la manifestation républicaine qui a eu lieu à Paris en janvier 2015, manifestation également historique par son caractère et son ampleur et répondant au mot d'ordre « JE SUIS CHARLIE »

Dans le même temps à Lavoux, la municipalité et son personnel fixaient sur la porte d'entrée de la mairie, l'affiche « JE SUIS CHARLIE » participant ainsi et aussi à montrer son opposition à la barbarie et au non respect de la vie humaine manifesté par des individus en réponse à la liberté d'expression.

Le buste de Marianne dans la mairie, l'affiche sur la porte, constituent un signal fort de notre attachement à l'unité nationale avec des références communes contre le terrorisme et pour la défense de la liberté d'expression, voir de notre liberté tout court.

De nombreux lavousiens et lavousiennes ont été sensibles à cette initiative.

Porte de la mairie de Lavoux avec l'affiche "Je suis Charlie" expression du soutien au mouvement national contre le terrorisme et pour la liberté d'expression.

Porte de la mairie de Lavoux avec l'affiche "Je suis Charlie" expression du soutien au mouvement national contre le terrorisme et pour la liberté d'expression.

 

Revenons plus directement à notre Marianne lavousienne. Celle-ci est la copie en plâtre de 90 cm. de hauteur d'une sculpture réalisée en 1879 par Paul Lecreux, dit Jacques France, franc-maçon. A l'origine le buste sculpté était destiné à une manifestation maçonnique de la loge « La Bonne foi » de Saint Germain-en-Laye. A cette époque, un comité dont Victor Hugo est président a la charge de trouver un emblème pour la IIIème république. Ce comité vote pour ce modèle de Marianne.

 

 

A Lavoux, il s'agit de la version profane de cette sculpture proposée dès 1880 aux mairies et autres bâtiments officiels de la République Française, version de laquelle ont été retiré sur l'écharpe les symboles maçonniques initiaux (niveau, compas, équerre et maillet). Ceux-ci ont été remplacés par les 3 dates républicaines : 1789, 1848 et 1870.

 

Nous sommes alors sous le régime de la « République triomphante », notre Marianne porte le bonnet phrygien, symbole de l'esclave libérée dans l'antiquité.

 

Cependant la troisième république est à la fois l'âge d'or du régime républicain et « l'un des régimes les plus critiqués de l'histoire de France.En établissant en 1881, la liberté de la presse, elle ouvre les vannes à tous les réquisitoires et à toutes les caricatures de son image symbolique... Elle réussit à se faire « traiter » de révolutionnaire par les conservateurs et les catholiques et de bourgeoise par le mouvement ouvrier. » (3)

Caricature anti-républicaine, Marianne est représentée, grosse, vulgaire et corrompue qui verse des pots de vin et remet des médailles aux affairistes (fin du XIXèle siècle) (1)

Caricature anti-républicaine, Marianne est représentée, grosse, vulgaire et corrompue qui verse des pots de vin et remet des médailles aux affairistes (fin du XIXèle siècle) (1)

 

Ce fait historique nous rappelle que la démocratie se nourrie et se vit par la multiplicité des opinions qui se confrontent dans la recherche toujours à renouveler du consensus.

 

 

En ce qui concerne l'achat effectif du buste, le registre des délibérations municipales nous renseigne sur ce point : « En 1883, le soir du 11 novembre , pour la première fois réuni dans la salle du conseil municipal, sur la proposition de Monsieur le maire (François Serre), le conseil municipal vote une somme de 120 francs pour l'achat d'un buste de la République et prie Monsieur le Préfet d'approuver cette décision. Ce buste est destiné à orner la nouvelle salle de la mairie » (4)

 

L'examen des délibérations suivantes du conseil municipal, nous amène à constater la véracité de cet achat. Ainsi, le 16 février 1884 : « La séance ouverte, Monsieur le maire informe le conseil municipal que de la somme qui avait été votée primitivement pour l'achat d'un buste de la République, il reste encore une somme de 63 francs ; en conséquence, il demande au Conseil s'il voudrait disposer de cette somme pour l'organisation d'une fête publique à propos de l'installation de ce buste. Le conseil après avoir délibéré accepte la proposition de Monsieur le Maire ». (5)

 

Ainsi c'est dans une ambiance festive que notre Marianne devait trouver sa place dans la maison commune. Son âge vénérable de 132 ans et sa marque historique lui permet aujourd'hui d'être classée à l'inventaire général du patrimoine culturel de la région Poitou-Charentes.

 

Notons que dans le canton, la mairie de Bonnes possède la même réplique de ce buste. Le musée de Rouen, quant à lui, conserve une des rares versions en bronze de ce modèle de Marianne.

 

Gageons qu’après ces indications, les lavousiens et les lavousiennes ne manqueront pas de porter un regard plus attentif à Marianne, lors de leur prochaine visite à la Mairie.

 

Vous savez, elle est sur votre gauche en entrant !

 

 

 

Rédaction : pour l'APL, Alain Georgel et Chantal Popilus

 

Notes :

  1. Maurice Agulhon, « Marianne, les visages de la République », Editions Gallimard, 1992

  2. Marianne, Wikipédia

  3. Maurice Agulhon, idem (1)

  4. et (5) Registre des délibérations municipales de Lavoux, 1882-1897

 

Sources :

1, 2, 4 et 5, voir Notes ci-dessus

Les bustes de la républiques appelés Marianne, Drac du Poitou-Charentes

 

Photos : Fonds documentaires de l'APL

 

 

Sans vertu, ni confiance plus de république... une injustice faite à un seul est une menace faite à tous.
Montesquieu

Publié dans Le petit patrimoine

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S
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L
Nous allons le faire. Merci